Systématique végétale et biologie du Lin Fibre
Le lin cultivé (Linum usitatissimum) est une plante herbacée annuelle de la famille des Linaceae cultivée principalement pour ses fibres, mais aussi pour ses graines oléagineuses.
C’est une plante annuelle dont la tige atteint de 0,60 à 1,20m de hauteur pour un diamètre de 1 à 3mm.
L’élément essentiel du fil de lin est la fibre élémentaire. Une fibre végétale est une expansion cellulaire morte qui est principalement composée de cellulose, d’hémicelluloses, de lignines et de pectines. Elle est soit isolée, soit regroupée avec d’autres en un faisceau.
Une fibre végétale est caractérisée par sa finesse et sa forme allongée par rapport à son diamètre. La plupart des fibres végétales mesurent entre 10 et 150 mm de long pour un diamètre de 10 à 50 µm, soit un rapport longueur sur diamètre compris entre 10 et 100.
Les fibres végétales peuvent être issues de différentes parties de la plante : des graines (poils séminaux, tels que le coton ou Kapok), de la tige ou du tronc (fibres libériennes, tels que le lin, le chanvre, le jute, la ramie, le bambou, le kénaf, le miscanthus, le sorgho)), des fruits (enveloppe, tel que la coco) ou des feuilles (Sisal, abaca, agave).
Les fibres de lin sont issues de la tige des plantes, le terme « paille » désignant communément une à plusieurs tiges entières.
Cette tige est composée de 4 zones concentriques de l’extérieur vers l’intérieur :
- L’écorce extérieure, recouvert d’une cuticule cireuse qui la protège de l’évaporation et de l’érosion ;
- Le liber : dans lequel se trouvent les faisceaux de fibres ;
- Le xylem : moelle interne formée par des cellules riches en lignines ;
- Le lumen : âme creuse.
Afin de pouvoir utiliser les fibres végétales au niveau industriel, il est nécessaire de les extraire de la plante via un processus d’extraction qui dépend de la localisation de fibres dans la plante.
Biologie du lin
Les 90 à 120 feuilles de la plante lin sur lesquelles se situent les capteurs chlorophylliens nécessaires à la photosynthèse, à l’élaboration des structures internes à partir de l’extérieur, doivent se dresser face au soleil pour transformer avec un rendement acceptable son énergie photonique. Par ailleurs, la sève, élément nourricier complémentaire, apportée à partir du réseau radiculaire, doit irriguer correctement l’ensemble vivant.
Chaque faisceau de lin se situe dans le prolongement d’un rayon de liber, d’où la classification des fibres de lin en « fibres libériennes ».
De la germination de la graine à sa sénescence, la plante croît et se développe et, pour ce faire, doit maintenir son « information-structure » à tous les stades de complexification de ce matériau. Cette action d’information-structure nécessite une fonction du type cérébral organisé chez le lin par le méristème apical.
Le méristème apical d’une tige de lin fait apparaître :
- Que ce méristème est végétatif : son rôle est d’inscrire le programme du futur de la plante, à savoir qu’il potentialise les ébauches des feuilles et de tous les tissus de la tige (sauf ceux de la moëlle) ;
- Que d’autres cellules spécialisées et géographiquement localisées de ce méristème en modifient l’action ; c’est le stade du méristème reproducteur qui utilise le programme inscrit au cours de son stade végétatif. Il devient donc opérationnel et les ébauches latentes entrent successivement en croissance.
- Successivement, car l’action synthétisante au niveau des feuilles n’est effective que pour celles se trouvant relativement proches du méristème.
A remarquer que le point critique de basculement fonctionnel du méristème se situe au niveau du point critique de fin de la phase végétative de la plante et correspond au maximum de développement radiculaire, ainsi qu’à l’augmentation maxima de la turgescence relative de la tige.
Deux observations découlent directement de ces caractéristiques :
- L’acquis informatif de la plante, par son méristème, résulta des conditions climatiques et de leurs variabilités, à savoir du rayonnement énergétique reçu avec écarts de température, durée d’ensoleillement et longueur respective du jour et de la nuit (photopériodisme) mais aussi de l’humidité avec précipitations pluviométriques et humidité relative. Ces conditions aléatoires dépendent également, pour partie, de la date du semis, elle-même aléatoire puisque tributaire des possibilités techniques d’utilisation du matériel agricole tracté pour la préparation des sols et les semis.
- La production de tissus végétaux, dont les fibres de lin, est qualitativement et quantitativement variable selon la situation géographique (sens vertical) dans la plante, puisqu’elle résulte de périodes d’activités différentiées.
L’évolution de la plante de lin et de ses constituants est anisotrope, c’est-à-dire différente selon les sens :
- En vertical, la tige est en extension, c’est la croissance ;
- A l’horizontal, elle développe des cellules nouvelles constitutives, c’est le développement.
Le développement de la plante de lin
La prolifération des fibres à l’intérieur des faisceaux fibreux est centripète.
A l’échelle de la cellule, l’évolution n’est pas non plus isodiamétrique :
Dans un premier temps, il y a formation d’une première couche de membranes primaires de grandes sections, extensibles en longueur dans le sens de l’axe de la plante (sens vertical). En cours d’élongation, de nouvelles membranes se forment sans une deuxième couche ; il y a intercalation de ciments entre les fibres ; cette deuxième couche entre également en élongation ; une troisième couche se forme, et ainsi de suite…
Le développement qui suit est tangentiel et consiste en dépôts stratifiés de cellulose dans la cellule (dépôts secondaires). Ces dépôts structurent la membrane déjà étirée et la modification mécanique qui en découle rend cette membrane inextensible ; les possibilités d’élongation sont donc interrompues.
En fonction de l’augmentation constante de la durée du jour, soit à partir du semis, le nombre de cellules et de couches fibreuses augmente de la base jusqu’au ¾ de la plante ; ensuite, ces quantités régressent pour les raisons suivantes :
- La longueur du jour se réduit ;
- Il y a compétition nouvelle entre la synthétisation de cellulose (fibres) et la synthétisation de lipides (graines) ;
- La plante arrive à sa sénescence.
En fonction de la variation aléatoire d’ensoleillement et d’une verse potentiellement possible, verse qui empêche les photons d’entrer en résonance avec les capteurs chlorophylliens des feuilles couchées, les cellules s’enrichissent plus ou moins complètement. Les lins constitués de cellules pleines sont dits de bonne qualité, les cellules partiellement creuses sont mous et les cellules vides, immatures, sont très peu utilisées en textile.
En général, les fibres de la base des tiges reçoivent peu d’énergie. Les fibres sont peu nombreuses et comportent beaucoup de fibres semi-creuses à immatures. Ces fibres seront détachées au cours du teillage et donneront les « étoupes de pied ». De même, les fibres du sommet, arrivées en fin de végétation de la plante, n’ont pas toutes la possibilité technique de remplissage et sont détachées mécaniquement pour donner les « étoupes de tête ».
En fonction de la variabilité des conditions de végétation, le nombre de fibres et de couches fibreuses est variable. Le nombre de couches moyen varie de 2 à 4-5, exceptionnellement davantage. Ce résultat est en relation directe avec le rendement en fibres de la plante.
Ainsi, au niveau de la fibre prise dans son contexte de faisceaux fibreux – qui, en fait, est le réel matériau textile utilisé par l’industrie-, les conditions de végétation sont essentielles pour la qualité, la quantité et le rapport économique de fibres Long Brin (filasse) / Etoupes.
La Croissance
Les conditions de cette croissance sont essentielles pour la qualité des fibres qui doivent être fines et longues. En effet, la facilité avec laquelle une fibre textile se laisse déformer sous un effet de flexion – de transformation industrielle ou/et d’utilisation – s’explique, en partie, par le fait qu’elle est constituée par une multitude d’éléments très fins, pour lesquels le rapport longueur/diamètre est très élevé de l’ordre de :
- 3.000 pour la laine ;
- 1.400 à 2.000 pour le coton ;
- 1.200 seulement pour le lin, qui compense partiellement cet handicap par son utilisation sous forme de faisceaux fibreux.
Pour le lin, les aléas climatologiques de nos régions tempérées perturbent fortement cette qualité d’élongation et en augmentent l’hétérogénéité.
Les fibres d’un faisceau de lin sont associées aux faisceaux vasculaires alimentant la feuille et sont solidaires de cette feuille. Ce faisceau technique de fibres est donc interrompu par cette insertion foliaire et, corrélativement, le nombre de faisceaux sera déterminé par le nombre de feuilles et la longueur par la position géographique des insertions foliaires dans le cortex des tiges.
Les feuilles sont insérées le long de la tige selon une disposition spiralée. La divergence entre deux feuilles successives est de 135° pour le lin. Une superposition virtuelle de 2 insertions foliaires tous les 8 intervalles foliaires, toutes les 3 spires semble être la règle.
Le niveau d’élongation déterminera, en plus de la longueur de la fibre, la longueur du faisceau fibreux technique, donc traduit une quantité importante du lin à transformer.
Une tige de lin contient en moyenne :
- De 30.000 à 50.000 cellules fibreuses ;
- De 80 à 120 feuilles et faisceaux fibreux soit en moyenne 400 fibres/faisceau, avec une grande dispersion qualitative inter et intra faisceaux ;
- Interfaisceaux puisqu’à la base les cellules fibreuses sont courtes, de grosse section, et souvent creuses, et au sommet, elles sont fines, longues et presque totalement pleines ;
- Intra-faisceaux puisque la prolifération centripète des fibres par couches, successivement dans le temps, liée à une durée limitée d’activité des feuilles, conduit à une croissance et un développement différencié et moins important pour les cellules fibreuses des couches internes.